La tuberculose affecte près d’un quart de la population mondiale et tue chaque année environ 1,4 million de personnes.

Pneumologue, responsable de la consultation de tuberculose au CHUV de Lausanne, médecin conseil à la Ligue pulmonaire vaudoise, Jesica Mazza-Stalder plaide en faveur d’une augmentation des financements alloués à la recherche. Elle est membre de la fondation ‘Swiss Tb’ qui promeut les échanges d’informations entre les différents groupes de recherche en Suisse.

Qu’en est-il de la tuberculose aujourd’hui ?

La plupart des objectifs internationaux pour mettre fin à la tuberculose n’ont pas été atteints. Le nombre de cas enregistrés a augmenté: en 2021, 10,6 millions de personnes ont été touchées contre 10,1 millions en 2020, soit une augmentation de 4,5%.

A quoi est due cette augmentation ?

Avec la pandémie de COVID-19, le nombre de cas diagnostiqués et notifiés dans le monde a nettement diminué, passant de 7,1 millions en 2019 à 5,8 millions en 2020. On a observé une légère augmentation des notifications de nouveaux cas en 2021 (6,4 millions). Cette baisse du nombre de cas diagnostiqués a entraîné, faute d’introduction d’un traitement adéquat, une augmentation du nombre de décès. C’est dans les pays à forte densité de population et forte endémie de tuberculose que la diminution du nombre de cas déclarés a été la plus marquée. Si elle n’est pas traitée, la tuberculose tue encore une personne sur deux. Les nombreux conflits dans plusieurs régions du monde ont sapé une partie des efforts déployés pour lutter contre cette maladie qui reste une des dix premières causes de mortalité dans le monde. Faute de structures adéquates et de fourniture des services essentiels, de nombreuses personnes n’ont pas été diagnostiquées ni traitées.

A quoi est due cette maladie et quels sont les symptômes ?

Elle est due au bacille de Koch (Mycobacterium Tuberculosis). Elle est souvent contagieuse quand elle touche le poumon. Elle est transmise par des gouttelettes émises par la toux. Les principaux symptômes sont une grande fatigue, de la toux avec production de crachats, une perte de poids, des sudations nocturnes, des douleurs thoraciques et une fièvre intermittente. A un stade avancé de la maladie, le patient peut expectorer du sang (hémoptysies).

Comment dépister la tuberculose latente ?

Elle se détecte via des tests sanguins. Une des particularités de cette maladie, c’est que le bacille de Koch peut rester dans l’organisme à l’état “dormant” pendant des années et “se réveiller” à l’occasion d’une baisse des défenses immunitaires.

Avons-nous toujours recours au BCG ? Y-a-t-il d’autres vaccins ?

Le BCG (Bacille de Calmette et Guérin), qui a fêté ses 100 ans en 2021, est le seul vaccin homologué. Il est très utile pour prévenir les formes graves de tuberculose chez les nourrissons. Il permet notamment d’éviter des cas de méningite tuberculeuse. Il est donc important de vacciner les nourrissons dans les pays à forte endémie. En revanche, il n’offre pas une protection suffisante aux adolescents et aux adultes, responsables de 90% des transmissions de la maladie.

A quoi imputer la pharmaco-résistance ?

La pharmaco-résistance résulte le plus souvent d’un manque de suivi des recommandations internationales, de prescriptions médicales erronées ou inadaptées, d’un abandon précoce du traitement, ce qui entraîne l’apparition de souches de Mycobacterium tuberculosis résistantes.

Quelles sont les principales avancées scientifiques ?

Les récents progrès en génétique, microbiologie et immunologie ont ouvert la voie à de nouvelles approches préventives et thérapeutiques. On peut désormais poser des diagnostics plus précis et plus rapides. Grâce à la biologie moléculaire, on détecte des souches résistantes aux antituberculeux sans avoir besoin d’attendre la croissance de la culture, ce qui permet de proposer d’emblée le bon traitement.

Les fonds consacrés à la recherche sur la tuberculose sont-ils suffisants ?

Non. Les investissements pour combattre la pandémie SARS-COV2 ont été immenses comparés à ceux alloués à la recherche pour lutter contre la tuberculose. Lors de la journée mondiale de la tuberculose, le 24 mars 2022, l’OMS a lancé un appel urgent en faveur d’une augmentation des investissements, notamment dans le développement de vaccins.

Comment fonctionne la Fondation pour la recherche sur la tuberculose?

Cette organisation à but non lucratif, fondée en 2001, soutient les travaux de chercheurs et promeut les échanges d’informations entre différents groupes de recherche en Suisse. Notre comité, composé de 12 scientifiques, octroie chaque année un prix à un chercheur qui s’est distingué par la qualité scientifique de son travail ou par sa contribution en matière de stratégies pour lutter contre la tuberculose. Nous sommes financés par les Ligues pulmonaires cantonales, des sponsors et d’anciens patients, mais nous avons besoin de plus de contributeurs pour mener à bien notre mission. 


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