DIPLOMACY

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L’ambassadeur de la République Centrafricaine, durant une session du Conseil des droits de l’homme

L’ambassadeur de la République Centrafricaine, durant une session du Conseil des droits de l’homme

Leopold-Ismaël Samba, doyen du groupe des Ambassadeurs africains
Le diplomate centrafricain démontre que l’ancienneté constitue un atout précieux
1 Sep 2021

Représentant permanent de la République centrafricaine auprès des Offices européens des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève et à Vienne depuis janvier 2009, l’Ambassadeur Leopold-Ismaël Samba met au service de l’ensemble du corps diplomatique la large expertise qu’il a acquise en exerçant des fonctions nationales et au sein du système multilatéral. Économiste et juriste de formation, ce diplomate africain est connu pour sa maîtrise de la langue de Molière, son humour… et son couvre-chef, qui ne le quitte que rarement.

Vous êtes le représentant permanent de la République centrafricaine (RCA) auprès des Offices européens des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève et à Vienne, et aussi Ambassadeur auprès de la Confédération helvétique. Comment décririez-vous les relations qu’entretient votre pays avec la Suisse ?

La RCA entretient d’excellentes relations avec la Suisse. Le Conseil fédéral a reconnu l’indépendance de mon pays, le 13 août 1960, et établi des relations diplomatiques dès 1964. Des accords ont été signés et nous coopérons dans le domaine de l’éducation et de la culture.

Quel est votre rôle en tant que Doyen du groupe des ambassadeurs africains de Genève ?

Je « parraine » les nouveaux arrivants, j’arbitre les dissensions avec des tiers et je facilite les relations avec le pays-hôte. En tant qu’ancien haut-magistrat, je veille aussi à ce que la Convention de Vienne soit respectée en matière d’immunités et de privilèges tout en arrondissant les angles, en cas de problèmes. Lorsque l’Afrique soumet la candidature d’un de ses ressortissants à un poste de direction d’une organisation internationale (comme cela a été le cas pour l’OMS et l’OMC), je coordonne certaines actions à Genève et je mobilise mes collègues Ambassadeurs.

Vous êtes l’un des vice-présidents du Groupe des ambassadeurs francophones de Genève. Quel est votre sentiment sur l’utilisation quasi systématique de l’anglais à l’ONU ?

Cette situation handicape de nombreux États, et en particulier les francophones. Il est regrettable que les Nations Unies ne soient pas à même de diminuer le fossé entre les deux langues officielles de travail du Secrétariat que sont l’anglais et le français, sous prétexte de manque de fonds. Le cadre législatif mis en place par l’Assemblée Générale en faveur du multilinguisme est, dans la pratique, peu respecté. Une solution devrait aussi être trouvée pour éviter les coupures budgétaires dans le domaine de l’interprétation et de la traduction des documents. Ces services sont cruciaux pour les travaux de l’organisation.

Vous êtes actuellement le coordonnateur du Groupe africain auprès de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). En quoi consiste votre rôle ?

Je porte la voix de l’Afrique au sein de l’OMS. La pandémie de la COVID-19 a mis en évidence la fragilité du système multilatéral pour résoudre la crise sanitaire à laquelle nous faisons face actuellement. Dans ce contexte, je partage les préoccupations des représentants des États africains. Plus de 3,5 milliards de vaccins contre la COVID-19 ont été distribués dans le monde, mais plus de 75 % sont allés dans 10 pays. Il faut accroître l’approvisionnement en vaccins des pays à revenu faible ou intermédiaire. A l’heure actuelle, seulement 1,39 % du 1,3 milliard d’Africains sont complètement vaccinés. Le déséquilibre qui subsiste dans la distribution des vaccins est choquant. Comme l’a déclaré le chef de l’OMS, « nous vivons un apartheid vaccinal ».

En 2018, vous avez eu l’idée de créer un Examen périodique universel (EPU) pour la santé. La proposition avait été soumise à l’OMS au nom du groupe des ambassadeurs africains. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Effectivement, j’avais été inspiré par le processus des droits de l’homme. Sous les auspices du Conseil des droits de l’homme, l’EPU consiste à passer en revue les réalisations de l’ensemble des 194 États Membres de l’ONU dans ce domaine. J’ai imaginé un mécanisme similaire pour la santé. Le Directeur général de l’OMS, le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus a évoqué ce projet dans ses allocutions d’ouverture de la 73ème Assemblée Mondiale de la Santé (mai et novembre 2020).

Quel est le but de ce mécanisme ? Où en êtes-vous actuellement ?

Cet « Examen universel de l’état de santé et de préparation » a pour but d’instaurer la confiance et la responsabilité mutuelles en matière d’action sanitaire. Les nations doivent être rassemblées autour du principe d’une approche faisant intervenir l’ensemble des pouvoirs publics pour renforcer les capacités nationales de préparation aux pandémies, instaurer la couverture sanitaire universelle et améliorer l’état de santé de toutes les populations. Je collabore en ce moment étroitement avec l’OMS sur une proposition détaillée qui sera présentée aux États Membres. L’Allemagne, le Cameroun, la France et mon pays ont convenu de collaborer avec le Secrétariat durant la phase initiale pour mettre au point et tester le dispositif.

Un dernier mot sur le rôle de la Genève Internationale ?

Plus que jamais, Genève est le lieu où bat le pouls du monde.

* Catherine Fiankan-Bokonga est journaliste, vice-présidente du Club Suisse de la Presse.
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