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Essor alarmant de la Nash ou maladie du soda
Sédentarité, malbouffe, addiction au sucre, via notamment la consommation de sodas, sont les grands ennemis du foie, l’un de nos plus précieux organes
1 Jul 2022

La bonne nouvelle pour le gastroentérologue, le Dr Thai Nguyen-Tang , c’est que, détectée à temps, la maladie dite du foie gras est réversible. Pas si simple toutefois étant donné qu’elle ne provoque pas de symptômes apparents.

On parle de plus en plus de la “NASH”. De quoi s’agit-il et quels sont symptômes ?

La NASH (Non Alcoholic SteatoHepatitis) ou stéatohépatite non alcoolique, est une inflammation chronique du foie qui est secondaire à une surcharge en graisse des cellules du foie. On l’appelle non alcoolique, car le mécanisme qui mène à l’inflammation lorsqu’elle est secondaire à l’alcool est similaire. L’inflammation du foie ne fait pas forcément de symptômes, d’où la nécessité de la dépister chez des personnes présentant des facteurs de risque. Le dépistage se fait par une prise de sang. Si l’inflammation persiste, le foie devient très cicatriciel pour aboutir à la forme la plus sévère d’évolution qui est la cirrhose. A ce stade, les patients risquent de développer des symptômes en lien avec la cirrhose.

Quelles causes ? Quelle évolution ?

Les causes ne sont pas complètement élucidées. Il existe 3 stades principaux dans l’évolution. Le premier est une surcharge progressive de graisses pour atteindre le stade de « foie gras » appelé aussi stéatose ou NAFLD (Non Alcoholic Fatty Liver Disease). Il existerait au niveau cellulaire un déséquilibre dans le transport des graisses avec un excès d’importation et déficit en exportation. Le deuxième stade est la NASH qui correspond à une réaction inflammatoire persistante à cet excès de graisse qui endommage progressivement le foie. Toute agression chronique de tissu du corps mène à long terme à du tissu cicatriciel, la fibrose. La cirrhose est la forme finale de l’excès de tissu cicatriciel. Elle constitue le troisième et dernier stade de la maladie. Déformé, bosselé, le foie n’arrive plus à effectuer le travail qu’il est censé faire : sécréter les protéines dont le corps a besoin et détoxifier les toxines produites. Le corps est alors en état d’insuffisance hépatique. Le stade de cirrhose est aussi un risque majeur pour le développement de cancer du foie.

Qui sont les personnes les plus à risque ? Y a-t-il des pays ou continents plus affectés que d’autres et si oui, pourquoi ?

Les patients à risque ont le plus souvent un ou plusieurs composants du syndrome métabolique : obésité, hypertension, hypercholestérolémie et diabète. Par analogie, la prévalence de la NASH dans le monde suit de près celle de l’obésité qui est un problème majeur de santé publique en augmentation fulgurante en lien avec la sédentarité croissante et l’alimentation trop calorique. Selon les chiffres de l’OMS, à l’échelle mondiale l’obésité a triplé depuis 1975. En 2016, plus de 1.9 milliard d’adultes (39%) étaient en surpoids (BMI 25-30) et 650 millions (13%) obèses (BMI plus de 30). Le continent américain est particulièrement atteint : aux Etats-Unis, 70% des adultes sont en surcharge pondérale et 40% obèses. 46% des américains présentent une stéatose et 12% un NASH. Selon l’OFSP, 42% de la population suisse est en surpoids et 13% obèse. La prévalence suisse de la stéatose est de 22% et du NASH 5%.

Peut-on en guérir et quels sont les traitements ?

L’inflammation du foie est réversible avec la perte pondérale. Récemment, il a été démontré que la fibrose, même avancée au stade de cirrhose, est aussi réversible avec la perte pondérale. Il est recommandé en cas de NASH, une perte pondérale de 5-7% du poids au rythme de 500g-1kg par semaine par des modifications de l’alimentation et une augmentation de l’activité physique. Au plan diététique, le régime méditerranéen est le plus recommandé avec une réduction de 500-1000 calories par jour. L’activité physique recommandée est d’effectuer 5 jours par semaine un exercice physique d’au moins 30 minutes. Il n’y a pas de médicament enregistré pour traiter la NASH. De nombreux médicaments sont en cours d’évaluation ; certains ont montré une certaine efficacité, mais ont des effets secondaires significatifs. Dans les cas d’obésité morbide (BMI à plus de 35-40), une chirurgie de réduction pondérale comme le bypass gastrique peut être proposé. Une régression importante voire une récupération complète des lésions a été notée. En cas de cirrhose avec une insuffisance hépatique, une transplantation de foie peut être proposée.

Certaines pratiques de soins comme l’acupuncture ou la naturopathie sont-elles des alliées précieuses ?

Il n’y a pas d’étude démontrant l’efficacité des soins non conventionnels sur l’évolution de la NASH. Le seul supplément naturel qui a montré une certaine efficacité est la Vitamine E à haute dose (800 UI par jour), mais son utilisation à long terme n’a pas été étudiée. En général, les traitements non conventionnels peuvent être des alliés thérapeutiques précieux dans les maladies chroniques avec une amélioration des plaintes fonctionnelles des patients (en lien avec la fonction d’organes) et la prise en charge émotionnelle et affective de ces pathologies chroniques.

Dr Thai Nguyen-Tang est Médecin indépendant, Hirslanden clinique La Colline et médecin consultant, Service de Gastroentérologie et Hépatologie, HUG, Genève. 

* Muriel Scibilia-Fabre est auteure et ancienne fonctionnaire de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED).
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